Forcément, dans un endroit pareil, c'est la première chose qui saute aux yeux...
Moi qui traque depuis toujours le nylon soyeux dans la plus morne salle de réunion, sur le plus glacial quai de RER, dans la plus banale supérette de quartier, des jambes pareilles, au milieu de la foule en survêtement ou en leggings du samedi matin, forcément, ça tranche...
Elles sont interminables ses jambes, et j'en conclue que la belle doit bien mesurer 1m75, au moins, parce que ses talons, et c'est a peu prés le seul bémol à apporter à autant de splendeur, ses talons sont juste banals, ils ne sont pas vertigineux ses talons, mais pouvaient-ils vraiment l'être, sans risquer de provoquer une véritable émeute...
Tout le monde la regarde, et moi subitement je ne vois plus qu'elle...
Son trench-coat assez court, dépassant à peine le milieu de ses cuisses, devient une sorte d'écrin à l'insoutenable perfection de sa féminité, que symbolisent si bien ses jambes affolantes, si parfaitement fuselées...
Et puis magnificence ultime, le nylon qui les habille n'est pas opaque...là ou bien trop de femmes cèdent à la facilité d'un déprimant bas ou collant opaque, la demoiselle a eu le bon goût d'opter pour un voile de bon aloi, et il n'aurait plus manqué qu'une affolante couture pour que je défaille définitivement...
Elle se retourne, jolie blonde dynamique au visage décidé, elle n'est visiblement pas là pour s'amuser...
En bon fétichiste contrariant que je suis, je dois avouer que je suis un peu déçu de découvrir enfin sa tenue complète sous son trench ouvert...
Elle porte court, intolérablement court...je tente vainement de comprendre si c'est une jupe, ou un short ou peut être même une robe, mais tout est noir, et puis c'est tellement furtif...
Dynamique disais je ? c'est une litote tant elle virevolte entre les rayons pour remplir son caddie garé dans l'allée centrale par soucis d'éfficacité...
Dynamique et méthodique donc, mais que diable fait donc cette executive woman un samedi matin dans ce triste supermarché de banlieue, l'endroit le moins glamour de la planète après la rue de Solférino ?!
"Bah, même les exécutive women sont bien obligées de manger", me dis-je alors pour justifier sa lumineuse présence dans ma grisaille matutinale...
Mais elle porte tellement court donc...et forcément, si cette "longueur" indécente a le mérite de magnifier encore plus ses jambes, il est également inconcevable qu'elle puisse porter autre chose que des collants avec ça...et ça, ça me contrarie beaucoup...
Et puis en même temps ça me rassure : ouf, cette femme n'est pas parfaite, et c'est finalement moins grave si on ne fait pas un bout de chemin ensemble, c'est tant pis pour elle mais c'est sa faute aussi, aprés tout elle n'a qu'a porter des jupes un peu plus longues pour pouvoir mettre des bas, et on pourra alors envisager de vivre ensemble bien sur, pourquoi pas, je vais voir ce que je fais ces 30 prochaines années et je vous dis...
Plouf plouf...
Et puis...
Et puis le paquet de café sournois, gloire au paquet de café sournois, lui échappe alors des mains, et elle se baisse pour le ramasser...
Et là, j'aperçois la lisière de son bas...
Et mon coeur a tenu, c'est un miracle...
Mais désormais j'ai acquis la certitude que je ne peux pas, que je ne peux plus ne rien faire...
Oui mais que faire mon Dieu, que faire avant que mon cerveau ne bout définitivement ?!
Et soudain, éclair de génie, sans bouillir...(oups, désolé!)
La veille, j'avais lu ce post chez Chilina, et là ça devient juste une évidence, c'est un signe du destin si j'ai lu ça précisément la veille, c'est sur, Dieu fait bien les choses voyons, mais si, tout le monde le dit...
Je vais donc faire pareil, parce que je ne sais pas, que je n'ai jamais su et que je ne saurais jamais draguer, alors lui écrire, la drague du pauvre, c'est évidemment ça LA bonne méthode, oh Chilina, merci, je t'adore !!
Bon...Mais je ne vais quand même pas ouvrir un paquet de bas en plein magasin pour rédiger ma déclaration d'amour sur le carton, entre deux ménagères de plus de
Vite, mes poches, un papier...mais, rien, nada, il ne me reste que les malheureux bulletins de vote inutilisés des primaires socialiste, et je ne veux surtout pas déclarer ma flamme sur le dos de Manuel Valls, insulte inconcevable à sa beauté, enfn celle de la demoiselle, pas celle du gugusse néolibéral de la gauche mollassonne et sécuritaire...
Alors je file au rayon fourniture scolaire, vite, un petit calepin, et je griffonne, difficilement, tant ma main tremble, ces simples mots, absolument...
...ridicules :
Vous êtes magnifique
jfb94 @ hotmail.fr
Pathétique, mais pas trouvé mieux, incapable de réfléchir...je confirme, l'amour rend un peu con...
Je plie le papier en deux, et maintenant commence la mission ultime, réussir à glisser l'anonyme missive discrètement dans le caddie, enfin si elle est encore là, j'espère qu'elle est encore là, pourvu qu'elle soit encore là...
Elle est encore là...
Le caddie aussi...J'attends qu'elle s'éloigne, je reviens dans l'autre sens, je m'approche, je tremble, je n'y arriverais jamais, tout le monde me regarde, j'ai chaud, je m'éloigne du caddie, elle revient, elle est sublime et je suis un con, elle repart, je reviens, je me colle contre son caddie, vague métaphore sexuelle, et je me penche dans le bac attenant pour faire mine de m'intéresser aux poulets dont je me fiche éperdument et hop, enfin j'y arrive, furtivement je jette le mot dans son caddie et je m'éloigne aussi vite que possible, sans me retourner, surtout ne pas se retourner, tout le monde m'a vu et me regarde en rigolant, c'est sur, et je veux pas voir ça !
Bon, j'éxagère...
...mais à peine...
Je suis soulagé, je ressens la décompression du sportif qui a fini son match, du drogué apaisé par son shoot...c'est la première fois que je fais un truc pareil, les premières fois c'est toujours émouvant, on ne les oublie jamais les premières fois...
Et maintenant, juste attendre, moi, le type le moins patient de la galaxie, attendre qu'elle m'écrive, parce qu'elle va m'écrire bien sur...je la regarde de loin, elle joue avec son téléphone là, je ne rêve pas, peut être qu'elle m'écrit déjà, je sors mon Iphone, je vais voir sur mon mail, mais non t'es con, c'est bien trop tôt, mais quand elle va rentrer elle va se jeter sur le PC et t'écrire, ah ben non y'aura son mec donc elle va attendre lundi matin d'être tranquille au bureau pour t'écrire ah oui mais si le papier est tombé du caddie ou bien si je me suis trompé, si j'ai mis jfp94, ou 84, j'écris si mal, ou si sa bouteille de lait s'est percée, et a coulé sur le papier...
Bon...
J'ai laborieusement terminé ce pour quoi j'étais venu et je suis rentré non sans mal, complètement désemparé, il m'en faut vraiment pas beaucoup...
Puis j'ai passé mon week end à consulter mes mails, frénétiquement, toutes les 10 minutes...
Et que croyez vous qu'il arriva ?!
Et bien absolument...rien...
Mais je progresse...